Contester une facture ? Oui, mais pas de n’importe quelle façon…


Posté le 9 juillet 2023 dans Actualités

« Les achats et les ventes se constatent par une facture acceptée » : telle est la règle posée par l’article 109 du Code de Commerce, issue du droit belge et bien ancrée dans notre Droit depuis des décennies concernant les litiges entre commerçants.

Concrètement parlant, un commerçant qui reçoit une facture et qui ne la conteste pas dans un bref délai est censé l’avoir acceptée : il s’agit là du principe dit de la facture acceptée appliqué de tous temps par les tribunaux luxembourgeois.

La Cour de Cassation a affiné l’application de ce principe en 2019 : l’article précité instaure une présomption légale, irréfragable (= qu’on ne peut renverser, remettre en cause), de l’existence de la créance affirmée dans la facture acceptée lorsqu’on a affaire à un contrat de vente.

Autrement dit, quand un commerçant reçoit une facture relative à une vente qu’il ne conteste pas dans un bref délai, il est censé l’avoir acceptée définitivement et devra donc la payer, qu’il ait ou non des arguments valables à faire valoir à son encontre.

Un commerçant, professionnel, doit donc être très prudent et diligent.

Pour les autres contrats commerciaux, toujours selon juridiction suprême, la facture acceptée n’engendre qu’une présomption simple de l’existence de la créance, le juge étant libre d’admettre ou de refuser l’acceptation de la facture comme présomption suffisante de l’existence de la créance affirmée (Cour de cassation, 24 janvier 2019, arrêt n° 16/2019, n° 4072 du registre).

Autrement dit, pour un contrat d’entreprise ou de prestation de service par exemple, la facture est présumée acceptée si elle n’a pas été contestée dans un bref délai, mais cette acceptation peut être remise en cause par tous moyens de preuve légalement admissibles.

Dans ce cas finalement, cela signifie que des contestations peuvent être formulées ultérieurement pour renverser cette présomption.

Mais n’importe quelles contestations : celles-ci ne doivent pas être floues, succinctes, imprécises ou évasives.

Un arrêt récent de la Cour d’appel du 25 mai 2023 (n° 58/23 – IX – COM) est venu rappeler comment contester une facture et donc comment renverser cette présomption simple.

Tout d’abord, la Cour rappelle que le commerçant qui n’est pas d’accord au sujet d’une facture doit prendre l’initiative d’émettre des protestations précises valant négation affirmée endéans un bref délai à partir de la réception de la facture.

La Cour insiste notamment sur la notion de précision quant aux contestations.

Dans le cas d’espèce, il s’agissait de plusieurs factures relatives à un chantier.

Le commerçant débiteur prétendait vouloir renverser la présomption simple par la production de divers courriers et mails.

La Cour a constaté que les différents courriers et mails en question ne faisaient nullement référence à l’une ou l’autre des factures dont le paiement était demandé ni même, de façon générale, au paiement desdites factures.

Afin que la présomption soit renversée, il faut que les courriers de contestation fassent référence à des postes précis des factures litigieuses et que lesdits courriers indiquent le lien entre des prétendues inexécutions et des reproches formulés à l’égard du créancier avec les factures litigieuses.

En résumé, il suffit au débiteur d’indiquer précisément pour quels motifs il s’oppose au paiement des factures concernées prises individuellement et non pas se contenter d’énumérer pêle-mêle des griefs à l’encontre du créancier.

Dernier point important, il est toujours important de contester en sus de la facture elle-même le quantum des montants réclamés.

En résumé, pour contester des factures avec efficacité, un commerçant doit :

  • faire systématiquement référence aux factures en cause ;
  • faire référence aux différents postes des factures qui sont disputés;
  • indiquer un lien entre des inexécutions et des reproches avec les factures ;
  • contester le quantum des montant réclamés.

Un bon conseil : en mettre plutôt trop que pas assez, tout en restant bien évidemment pertinent.

Confier la rédaction d’un courrier de protestation de facture à un avocat spécialisé permet souvent d’éviter par la suite aux professionnels bien des déconvenues.

L’équipe JURISLUX se tient à votre disposition pour vous assister.

Me Pascal PEUVREL

Avocat à la Cour

pascal.peuvrel@jurislux.eu

Me Fabrice BRENNEIS

Avocat à la Cour


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