La précision des motifs de licenciement


Posté le 11 décembre 2023 dans Publications

La procédure de licenciement d’un salarié n’est pas à prendre à légère et aura des conséquences pour toute la suite de la vie de la société et du salarié licencié.

En effet, de la bonne tenue de cette procédure dépendra l’issue d’un futur potentiel litige.

Nous avons choisi aujourd’hui de traiter un sujet au cœur du droit du travail à savoir la problématique du licenciement abordée sur l’angle unique de la lettre contenant les motifs du licenciement, respectivement des motifs en eux-mêmes et plus particulièrement encore, du caractère essentiel de précision que ces motifs doivent revêtir.

Bien qu’étymologiquement, le terme « précision » vienne du latin « praecisio » signifiant « trancher, rogner », en matière de précision des motifs du licenciement, il s’agit bien au contraire de ne pas rogner sur la qualité et la quantité de la justification du licenciement.

Ainsi, tant dans le cadre d’un licenciement avec préavis (article L.124-5 du Code du travail) que dans celui d’un licenciement avec effet immédiat (article L.124-10 (3) du Code du travail), les motifs du licenciement devront être si précis qu’ils devront « permettre au salarié de connaître exactement le ou les faits qui lui sont reprochés et de juger ainsi en pleine connaissance de cause de l’opportunité d’une action en justice de sa part en vue d’obtenir payement des indemnités prévues par la loi en cas de congédiement irrégulier et abusif ; elle doit ensuite être de nature à empêcher l’auteur de la résiliation d’invoquer a posteriori des motifs différents. » (Justice de paix de Luxembourg, 18 juillet 2022 N° 2145/22).

La précision des motifs doit également et tout naturellement permettre au juge d’exercer son contrôle relatif à la régularité du licenciement.

Quelques situations somme toute communes ont vocation à survenir dans bon nombre de sociétés, dont voici un aperçu.

Ainsi, prenons l’exemple d’un salarié licencié pour « un manque de communication », sans aucune autre indication.

Attention ! Cette mention en tant que telle est bien trop imprécise.

En tout état de cause, il faut que le reproche lié au manque de communication soit accompagné d’exemples, datés, circonstanciés et permettant au salarié d’apprécier la situation et, le cas échéant, d’en apporter la contradiction.

Il en est de même pour des motifs liés à « un mauvais comportement », un « manque de professionnalisme » ou encore à « un défaut d’investissement » qui devront systématiquement être suivis d’explications on ne peut plus détaillées.

Autre cas d’école, en cas d’absences régulières d’un salarié, les juridictions sociales attendent des motifs du licenciement qu’ils indiquent le nombre de jours d’absence, leur date exacte ainsi que l’indication de l’impact de ses absences sur le bon fonctionnement de la société (Cour d’appel, 9 mai 2016, N° 40662 du rôle).

Il est à noter également que des reproches directement liés à un client, un fournisseur, ou tout autre intervenant auprès de la société, devront de préférence citer soigneusement le tiers en question ou tout le moins apporter des éléments permettant au salarié de savoir avec précision à quel protagoniste il est fait référence, sans doute possible.

Dans un autre registre, si le licenciement est basé sur des considérations d’ordre économique, il va sans dire que la déclinaison des motifs devra nécessairement mettre en lumière des données chiffrées en présence par exemple d’une baisse du chiffre d’affaires ou encore l’explicitation des mesures prises en cas de suppression de poste pure et simple ou de restructuration de la société (mesures prises et leur incidence sur le poste de travail).

La jurisprudence retient en effet que « l’exigence de l’énoncé précis des motifs constitue une garantie contre toute mesure arbitraire en cas de licenciement individuel pour cause économique » (Cour d’appel, 29 avril 2010, n° du rôle 34702).

Il est primordial d’avoir à l’esprit, et c’est pour cela que nous insistons sur ce point, que les motifs du licenciement envoyés au salarié lieront définitivement l’employeur à ce dernier en cas de procédure devant le Tribunal du travail.

Il s’agira également de prendre garde à ne pas tomber dans le piège de l’article L.124-11 (3) alinéa 2 du Code du travail qui dispose que « L’employeur peut en cours d’instance apporter des précisions complémentaires par rapport aux motifs énoncés ».

Cette possibilité laissée à l’employeur « permet uniquement de compléter les motifs invoqués par des éléments de détail, mais non pas de pallier à (sic) une absence de précision de la lettre de licenciement », selon la jurisprudence en vigueur (Cour d’appel, 21 novembre 2019, n° CAL-2018-00619 du rôle).

L’imprécision des motifs est bien souvent le premier écueil du côté des employeurs tout en étant la bonne affaire pour les salariés qui verront leur licenciement déclaré abusif à défaut de précision, en prime ils pourront donc bénéficier des indemnités découlant de ce caractère abusif.

Ainsi, les motifs du licenciement quoique potentiellement réels et sérieux et qui auraient raisonnablement dû être considérés comme justifiant le licenciement y afférent, à défaut de précision, ne vaudront tout simplement rien devant les juridictions et seront purement et simplement écartés.

Ce critère de précision qui semble à première vue assez simple à honorer donne pourtant lieu à de nombreuses affaires devant les tribunaux, toujours très incertaines et sujettes à pléthores de débats.

Nous ne pouvons dès lors que conseiller aux employeurs qui envisagent de licencier un ou des salariés, de s’adjoindre les services d’un avocat afin de limiter, dans la mesure du possible, les risques que le licenciement opéré soit déclaré abusif.  

Un accompagnement est tout aussi fondamental pour les salariés licenciés, qui se trouvent parfois en situation de déséquilibre significatif par rapport à leur employeur et n’osent parfois même pas agir, découragés par les moyens bien plus importants à disposition de leur employeur, élément ne préjudiciant en rien leur propre défense, mais croyance qui a malheureusement pour le rétablissement de la justice la dent dure.

L’expertise du cabinet JURISLUX en droit du travail vous assurera un accompagnement efficient avec en ligne de mire, la défense optimale de vos intérêts.

Me Pascal PEUVREL                                                                     Quentin GAVILLET

Avocat à la Cour                                                                         Avocat

JURISLUX SARL                                                                  

pascal.peuvrel@jurislux.eu


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